tequila vs mezcal

le mezcal, cette boisson que jamais je ne puis, même en la portant à mes lèvres, croire réelle

Au-dessus du Volcan, Malcolm Lowry – 1947

C’est difficile à suivre ces derniers mois.
Le premier samedi de février on fêtait l’International Pisco Sour Day, aujourd’hui on célèbre la l’International Margarita Day ; en mai la Chartreuse et le Cocktail [en général] auront droit à leur journée : Autant dire que les sujets d’articles vont foisonner.

Le plus ardu, outre le rythme, c’est de trouver un angle intéressant qui pourrait être source de nouvelles recherches et de nouvelles connaissances autour du bien-boire. Mon intérêt croissant pour les ingrédients qui composent les boissons mélangées m’amène à me focaliser sur les spiritueux d’agave qui participent à ce délice ; et plus précisément sur la star du moment : le mezcal.

Agent 002

margarita

Le mot espagnol Margarita signifie Marguerite en français et Daisy en anglais.
Les Daisies sont des boissons mélangées à base de spiritueux, jus d’agrume et liqueur ou sirop.
La première mention d’un Tequila Daisy remonte à 1936.
L’année suivante, le livre de cocktail café royal (1937) de William James Tarling présente une recette nommée Picador demandant tequila, jus de lime et Cointreau.
Il faudra attendre 1953 pour qu’un journal nomme cette recette Margarita.

l’esprit du mexique

On va se concentrer sur un breuvage encore plus mexicain que la margarita : le mezcal.
Le livre Mezcal : l’esprit du Mexique de David Migueres et Alexandre Vingtier, illustré avec les beaux dessins d’Agent 002, est l’unique source des documents utilisés dans cette humeur.

différences

La tequila est un mezcal mais le mezcal n’est pas une tequila.
Mezcal signifie agave cuite et fait référence à tous les spiritueux utilisant cette plante.
La tequila est une appellation spécifique de mezcal, réalisée dans l’état de Jalisco (où se situe la ville de Tequila, fondée en avril 1530).
D’autres spiritueux d’agave comme la Bacanora, la Raicilla et la Chiapas sont des mezcals, juste moins connus que la tequila.

Rien de tel qu’un petit tableau pour comprendre :

mythologie

Le vino de mezcal comme il était appelait, a une forte symbolique au Mexique.
Mayahuel, la déesse de la fertilité, est directement associée à la maguey (coeur de l’agave).
Celle-ci a 400 seins, en référence aux nombreuses pousses des feuilles de maguey et au jus laiteux qu’elle produit.
Lait que les aztèques transformaient en pulque (boisson alcoolisée fermentée à partir de jus d’agave).
400 seins car 400 enfants : les Centzon Totochtin (400 lapins), dieux de l’ivresse et de ses états (joie, peur, colère, etc).

l’agave

L’agave n’est pas un cactus !

Le genre Agave appartient à la famille Asparagaceae (asperges) originaire d’Amérique du nord et comprenant plus de 200 espèces.
23 espèces d’agave poussent sauvagement à Jalisco (état de la Tequila), dont les plus communes :

  • Agave Angustifolia (parent génétique de l’agave Tequilana Weber)
  • Agave Schidigera
  • Agave Maximiliana

Pour la tequila, une seule espèce : l’agave bleue Tequilana Weber en hommage au botaniste allemand Frédéric Albert Constantin Weber qui la découverte en 1902. Pour le Mezcal, pas de variété spécifique, et le choix de l’agave influe sur le goût final.

Entre 5 et 30 ans pour arriver à maturité

fabrication

1. ramassage

On ramasse la piña (coeur d’agave, aussi appelés maguey) à maturité (au bon degré BRIX pour une bonne quantité de sucre fermentescibles), sans tâches rouges (signe de fermentation interne) et on coupe bien près du cœur, car s’il reste des bouts de feuilles extérieurs, ils apporteront du méthanol.

NB : un coeur d’agave fait 4 à 10kg.

2. cuisson

Tradition ou innovation : c’est là que se joue, en grande partie, la différence entre mezcal et tequila dans l’inconscient collectif.
Si le ramassage suit toujours les mêmes règles, la cuisson du coeur d’agave peut prendre différentes directions :
Tradition : fosses souterraines, ou hornos (four traditionnel).
Innovation : autoclaves et diffuseurs (machine industrielle qui utilisent des flux d’eau chaude sous pression pour extraire efficacement le sucre de l’agave : Le diffuseur asperge l’agave d’eau et d’acide pour en extraire le liquide pulpeux et fermenté)

NB : En fosse il faut 3 à 5 jours, en four il faut entre 24h en 80h, en autoclaves 10-11h.

3. broyage

On broie ou concasse pour libérer le liquide sucré fermentescible.
Tradition : main (hache ou maillet) ou Tahona (pierre volcanique de 2 tonnes)
Innovation : broyeur à cylindre

NB : il faut 3h pour écraser une maguey avec la tahona.

4. fermentation

Tradition : souches de  levures sauvages dans des cuve en bois de pin appelées pipones devant être nettoyées après chaque utilisation et changées tous les 4 ans. Elles possèdent un contrôle thermique naturel qui protège des températures externes.
Innovation : levures propagées et cuves inox, moins rustiques mais plus solides et faciles à nettoyer.

NB : c’est l’inuline, une fibre sucrée présente dans agave (qu’on retrouve dans l’ail et l’artichaut) qui contient le sucres simples.

5. distillation

Tradition : distillation en alambic en argile ou cuivre, avec ou sans bagaso (bagasse).
Le cuivre réagit avec le soufre présent dans le mosto (moût) et évite qu’il ne se retrouve dans le distillat.
Innovation : alambic en acier inox ou distillation continue en alambic à colonnes.

alambic en argile

6. maturation

Tradition : vieillissement dans anciens fûts de whisky américains ou fûts de chêne français.
Le chêne européen est plus dense , avec moins de lactone et d’oxygène que le chêne des USA.
Innovation : expérimentation avec anciens fûts sherry, vin, rhums, etc.

NB : À Jalisco, la part des anges est de 1% par mois.

degustation

Pour bien boire le mezcal, pas de sel sur la main et de lime à croquer.
Au pire, de la poudre de piment et un quartier d’orange.
Deux idées de récipients pour suivre la tradition >
Jicara : moitié de calebasse creusée faisant récipient robuste pour boire mezcal.
Veladora : Verre à shot côtelée avec large bouche pour faire circuler arômes et une croix au fond.

le choix du flacon

On imagine souvent le mezcal comme fumé, mais ce n’est pas toujours vrai.
Voici quelques références positionnées selon leur personnalité :

On voit que le célèbre Del Maguey Vida de Ron Cooper, adulé des barmen car financièrement accessible et très typé, ne se situe pas du tout vers le centre, et qu’un Pierde Almas Conejo sera son némésis dans un cocktail.

¡ para todo mal mezcal, para todo bien tambien !

proverbe de oaxaca

Santé chers Bibules.

Votre échanson.

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